ÉDITORIAL

Perspectives missionnaires n° 54

Quatre convictions pour la mission

Jean-Marie Aubert

Ordonné prêtre dans l’Église catholique il y a plus de trente ans, pour le diocèse de Paris et pour le diocèse d’Antsiranana à Madagascar, je travaille alternativement, par période de six ans, dans la Grande Ile et en France. Je viens de regagner Madagascar pour être l’ancien d’une équipe de jeunes prêtres malgaches à Antalaha, dans le Nord-Est de l’Ile. À l’occasion de ce retour, je voudrais partager avec vous quatre convictions pour la mission.

En quelque lieu que je me trouve, je me ressens en situation missionnaire

En 1943, les abbés Godin et Daniel avaient écrit un petit livre intitulé : France, pays de mission ? Depuis cette époque, les chrétiens de France savent que l’on peut supprimer le point d’interrogation. Une paroisse en France, comme à Madagascar, se gère sur les marges. C’est l’investissement de la communauté chrétienne envers les plus éloignés et les plus pauvres qui nourrit la vie et authentifie le culte du noyau paroissial. J’ai été responsable de paroisse à Paris et dans le Nord de Madagascar. Dans chaque situation, il y a des plus éloignés et des plus pauvres. La mission est de partout à partout.

La mission ici et la mission là-bas se fécondent réciproquement

Lorsque l’on réfléchit en France sur le remodelage des communautés catholiques paroissiales, en fonction par exemple du nombre déclinant des prêtres, des évêques prennent appui sur la vie des communautés de base en Amérique latine, en Afrique ou encore à Madagascar. Ce qui est vécu sur un continent différent, dans un contexte différent, nous aide ici à inventer une façon autre d’annoncer l’Évangile. Nous ne sommes jamais missionnaires tout seuls.

L’Église universelle se dévoile « communion pour la mission »

    Ayant eu l’occasion ces dernières années, en tant que responsable du Service de la mission pour les évêques de France, de voyager et de rencontrer les Églises des différents continents, j’ai mieux perçu la dimension universelle de la mission. Je me souviens d’avoir participé, il y a quelques mois, à un congrès missionnaire pour l’Afrique de l’Ouest. Il était question de l’évangélisation des peuples de la région dans des situations quelquefois difficiles. Mais aussi de l’entraide des Églises pour la mission. Chaque année, par exemple, la conférence des évêques du Burkina-Faso envoie trois prêtres diocésains dans d’autres Églises, que ce soit au Niger ou au Mali, au Maroc ou encore en France. Ces prêtres, prêtés pour un temps, se mettent au service de la mission dans l’Église d’accueil. L’Église universelle se dévoile ainsi « communion pour la mission ».

La mission est vécue comme témoignage commun par delà les dénominations

    Que ce soit à Paris ou à Madagascar, j’ai toujours essayé de collaborer avec les communautés protestantes existant sur le lieu. Dans le Nord de la Grande Ile, à Anivorano-Avaratra, dans une région où catholiques et protestants représentaient moins de 15 % de la population, nous faisions des tournées dans les villages avec l’évangéliste FJKM (Église de Jésus-Christ à Madagascar) de la région. Nous organisions ensemble ces tournées, nous nous partagions l’animation des réunions avec les jeunes ou les adultes, de même que les prédications. Cette fraternité pour la mission a été, je crois, un signe puissant qui a encouragé les communautés catholiques et protestantes qui traversaient alors une période difficile à reprendre force pour l’annonce de l’Évangile, selon la tradition de chaque dénomination.
    Bien des fois, au plan de l’action pastorale comme de la recherche théologique ou de la vie des associations de théologiens de la mission, j’ai éprouvé la fécondité du croisement des traditions théologiques, spirituelles et pastorales de chaque Église. En Europe comme à Madagascar et partout dans le monde, le témoignage chrétien a tout avantage à être témoignage commun.
    C’est d’ailleurs le sens de ma présence, comme théologien catholique, au sein de l’équipe de rédaction de notre revue, Perspectives Missionnaires.

    Antananarivo, le 23 septembre 2007